Collectif Jean de Neyman
La Résistance en mémoire

Site de recherches sur la vie de Jean de Neyman, Résistant, fusillé le 2 septembre 1944 à Saint-Nazaire (Heinlex) en Loire-Inférieure (Loire-Atlantique aujourd’hui) - France.

Septembre 2023 - Commémoration à Saint-Nazaire
Article mis en ligne le 28 mai 2024
dernière modification le 30 mai 2024

par Patrice

Contexte

Cela fait 79 ans, jour pour jour, que Jean de Neyman a été fusillé, un samedi aussi, le 2 septembre 1944, au moment où la France était en train d’être libérée. La commémoration de cette année 2023 nous pousse vers le 80e anniversaire.
Une partie de la famille de Jean est présente : sa nièce Dominique de Neyman, accompagnée par sa fille Claire Buchbinder venue avec son fils Pierre Stapf. C’est toujours avec plaisir et chaleur que les organisateurs, le P.C.F. local et le Comité Départemental du Souvenir des Fusillés de Châteaubriant et Nantes et de la Résistance en Loire-Inférieure [1], participantes et participants les accueillent et se sentent soutenus.

À l’écoute de l’allocution
Faite par Cédric Turcas
© Photo P.M. / Collectif J.d.N., 20230902-7945

« Honorer aujourd’hui la mémoire toujours vivante de Jean de Neyman ne répond pas seulement à un devoir que nous avons vis-à-vis du passé.
Cet hommage est aussi un moment pour faire connaître aux nouvelles générations ce passé, à travers l’engagement des femmes et des hommes qui, au mépris du danger, ont résisté à l’occupant nazi et au régime complice de Vichy, ces résistants qui, alors que la répression était impitoyable, n’ont cessé de croire à la victoire contre la barbarie nazie et d’espérer en un monde plus juste. »
C’est en ces termes que le ton a été donné par l’allocution lue par Cédric Turcas, secrétaire général du parti communiste de Saint-Nazaire ; le protocole est assuré par Christian Retailleau, président du Comité Départemental du Souvenir.
Le dépôt de gerbes s’en est suivi avec les représentants des organisations au pied de la stèle entourée de cinq porte-drapeaux. La municipalité n’ayant pas de représentant, leur gerbe fût déposée par la suite près des deux autres.
Dans les mains des participants des tracts ? Non, il s’agit du texte du Chant des Partisans qui a été entonné en chœur par la soixantaine de personnes présente.
Nouveauté appréciée en ce temps caniculaire, un verre de l’amitié est près d’un local municipal. Cela a permis de discuter à bâtons rompus sur l’organisation du 80e anniversaire avec les personnes présentes. De nombreuses idées ont été proposées accompagnées de volontaires à l’organisation.
À noter la création d’un Collectif Jean de Neyman qui s’occupera essentiellement d’une page Wikipédia sur Jean et un site internet dédié (vous y êtes ! ). Ayant une très grande quantité d’éléments archivistiques, ce collectif la met à disposition de toutes et tous pour la mise en place de leurs initiatives.
Rendez-vous est donné au samedi 7 septembre 2024 pour une cérémonie exceptionnelle en ce jubilé.

Allocution du P.C.F.

(Seul le prononcé fait foi)

Cédric TURCAS
Secrétaire Général du P.C.F. de Saint-Nazaire

Monsieur le Député,
Monsieur le Sénateur,
Monsieur le représentant de Monsieur le Maire,
Mesdames et Messieurs les élus,
Mesdames et messieurs les membres de la famille de Jean
Messieurs les présidents de Buchenwald-dora 44 et de l’UNC de Saint-Nazaire
Messieurs les porte-drapeaux,
Chers camarades,
Chers amis,

Nous sommes réunis à nouveau, en cette année 2023, pour commémorer le 79e anniversaire de l’exécution de Jean de Neyman, fusillé par les forces d’occupation nazies le 2 septembre 1944, au moment où la France était en train d’être libérée.

Honorer aujourd’hui la mémoire toujours vivante de Jean de Neyman ne répond pas seulement à un devoir que nous avons vis-à-vis du passé.

Cet hommage est aussi un moment pour faire connaître aux nouvelles générations ce passé, à travers l’engagement des femmes et des hommes qui au mépris du danger ont résisté à l’occupant nazi et au régime complice de Vichy, ces résistants qui alors que la répression était impitoyable n’ont cessé de croire à la victoire contre la barbarie nazie et d’espérer en un monde plus juste. Ce moment doit contribuer aussi à combattre les idéologies fascistes, porteuses, sous des formes renouvelées de haine et d’exclusion de l’autre, de racisme et d’antisémitisme, de xénophobie.

Notre devoir de militant.es aujourd’hui est de nous saisir de ces savoirs, ces ressources, pour en témoigner, pérenniser leur connaissance les faire vivre au présent.

Il nous faut les contextualiser pour que l’espoir et la confiance en l’avenir, en l’humanité, annihile la résignation et le repli, réflexes humains qui perpétuent la subordination des masses au profit d’une caste qui se nourrit d’un système capitaliste de plus en plus oppressant.

Jean de Neyman naît à Paris le 2 août 1914 dans le 7ème arrondissement, de parents immigrés polonais arrivés en France au début du 20e siècle.

Une famille plutôt aisée où la culture et la philosophie font partie des valeurs et de l’éducation autant que le respect.

Jean n’attendra pas la guerre pour faire valoir et défendre ses valeurs.
Dès 1934 à Strasbourg il s’engage au Parti Communiste Français. Il rédigera et diffusera avec ses camarades « Le Prolo de la Brûche », journal de propagande local, outil indispensable à la bataille des idées en cette période.

En 1939 il prendra des responsabilités dans la toute jeune Union Étudiante Communiste créée au cours de l’année scolaire 1938-1939, organisation autonome affiliée à la Fédération des Jeunesses Communistes.

Mobilisé en 1939 par l’armée française, il est affecté dans un laboratoire parisien où il vérifie la nourriture pour l’armée.

Démobilisé en 1940 en raison d’une loi de Vichy interdisant la fonction publique aux Français d’origine étrangère, Jean de Neyman dut quitter l’enseignement public et entra alors comme professeur au cours secondaire privé « Le Cid » à La Baule.

Arrivé en Loire-Inférieure, il commencera à y mener une propagande intense contre les occupants dans les milieux qu’il fréquente puis deviendra par la suite un des organisateurs de la résistance dans la Région.

Après avoir notamment aidé à fuir, puis à faire libérer deux résistants ayant tirés sur des soldats Allemands, il entre dans la clandestinité en mai 1944 et constitue un groupe qui résidera dans la ferme de Joseph Gergaug à Kermichel à Saint-Molf.

En juin 1944, à la faveur des lourdes défaites allemandes sur le front soviétique et du débarquement allié, les actions du groupe, nourries par l’espoir d’une victoire possible, se multiplient.

Du sabotage d’ouvrages militaires, aux coupures de câbles électriques et téléphoniques en passant par la guérilla, la destruction et le désamorçage de mine, l’activité du groupe s’intensifie chaque jour.

Le 17 août, deux de ses camarades marins sont surpris à proximité de la ferme par une patrouille allemande.

C’est en discutant pour tenter de libérer l’un d’eux que Jean sera arrêter.

Les deux hommes seront amenés ici même, au château d’Heinlex.

Jean réussira à innocenter ses camarades de lutte en prenant sur lui toutes les responsabilités.

Il est condamné à mort le 25 août 1944, il se défendra seul et impressionnera les allemands avant de signer son pourvoi auprès de l’officier allemand commandant la place de Saint-Nazaire.

Le pourvoi rejeté, il sera fusillé par les Nazis le 2 septembre 1944, il y a 79 ans jour pour jour.
Jean écrivit une lettre à ses parents dont je vais vous livrer l’extrait suivant.

« Parmi tous les risques, j’ai l’intention de prendre mes responsabilités aussi clairement que ma conscience m’en donnera les moyens. Je voudrais que vous – (ceux qui survivront) – sachiez vous consoler de ma perte, car je me considère comme un élément, un petit chaînon dans l’évolution de notre monde, et puisque nous sommes dans la période du gros travail, et qu’il doit y avoir d’innombrables chaînons de brisés et d’usés, peu importe au total qu’ils le soient de façon rationnelle, individuelle… »
Quelle leçon nous apporte Jean dans cette lettre empreinte d’une conscience collective, d’une conscience républicaine au combien supérieure à sa propre existence.
Comment ne pas y voir la somme des êtres résistants qui ont eu à faire ces choix éclairés au risque de leur vie pour que nous puissions vivre libre, vivre en paix ?
Comment ne pas y voir une sommation à diffuser aujourd’hui ces valeurs dans toute notre société, à l’heure où les derniers témoins vivants de cette époque nous quittent peu à peu ?
Je pense notamment à Odette Nilès qui nous a quitté cette année et à qui nous rendrons un hommage appuyé lors des commémorations du 22 octobre prochain à Châteaubriant.
À mesure qu’ils nous quittent, nous sentons cette menace qu’une autre guerre est possible, demain peut-être ou un peu plus tard… mais notre pays, fracturé sur l’autel du libéralisme serait-il encore capable de faire corps ?
Comment pouvons-nous encore supporter aujourd’hui un tel déballement de haine, de discrimination, de racisme dans notre société.
Chaque jour qui passe instaure une banalisation de l’extrême-droite et toute l’actualité se focalise sur le rejet d’une communauté, d’une religion, d’un genre ou d’une orientation sexuelle.
Chaque jour qui passe voit dans le même temps se creuser des fossés demain insurmontables, celui des inégalités mais aussi celui entre le peuple et ses représentant.es, entre le peuple et sa police, sa justice.
Chaque jour qui passe, nous montre combien la paix est précieuse quand les conflits s’intensifient en Afrique comme en Ukraine sur fond d’impérialisme et de colonialisme que l’on croyait avoir naïvement dépassé.
À mesure que ces témoins nous quittent nous avons le sentiment aujourd’hui d’être au chevet d’une paix mourante, victime d’une société capitaliste qui vampirise l’humain et ses valeurs profondes.
Alors mes camarades, nous devons nous saisir de chaque occasion pour témoigner et résister à notre tour.
Cette résistance faite de femmes et d’hommes qui au milieu de tous ces malheurs, ont su s’organiser, fédérer, réfléchir, s’élever pour que vive la paix, la liberté.
Nous aurons l’occasion de le faire à chaque hommage, à commencer par les commémorations du 22 octobre prochain à Châteaubriant, mais également à l’occasion de la Pantéhonisation de Missak Manouchian qui aura lieu le 21 février 2024.
Disons-le de suite, nous ne sommes pas dupes de la récupération politique opérée à l’occasion par le président de la République, tout comme l’un de ses prédécesseurs l’avait fait avec Guy Môquet.
Et que dire du sort réservé à Mélinée Manouchian qui a défaut d’être Panthéonisée, accompagnera simplement son Mari au Panthéon.
Oui vous l’avez bien compris, en 2023 encore le rôle des femmes, de Mélinée en particulier est encore piétiné par un patriarcat institutionnel.
Je vous invite à lire la biographie de Mélinée et le rôle essentiel qu’elle à jouer dans la MOI entre autres pour comprendre qu’elle était elle aussi un chaînon tout aussi indispensable du groupe et surtout la dactylographe qui nous permet de pouvoir transmettre ces savoirs et mémoires aujourd’hui.

Pour autant nous auront à cœur de saluer et de faire connaître, à une époque où certains s’interrogent sur « l’identité française », l’engagement de ces « étrangers » , dont beaucoup avaient fui les pogroms antisémites en Europe.

De saluer aussi le travail du Sénateur communiste Pierre Ouzoulias, qui se bat depuis de nombreuses années pour la reconnaissance institutionnelle du Héro de l’affiche rouge.

Enfin et j’en terminerai là-dessus, nous avons un an tout.es et tous ici présent.es pour faire du 80e hommage à Jean de Neyman un temps fort de la vie nazairienne et au-delà en prenant toutes les initiatives possibles pour en faire un évènement singulier au service du savoir et de la culture de la résistance contre toutes les discriminations et pour une société de demain plus libre et en paix.

Merci

Télécharger en P.D.F.

Galerie d’images

© Photo <acronym title="Patrice Morel">P.M.</acronym> / Collectif <acronym title="Jean de Neyman">J.d.N.</acronym>, 20230902-7938 <p>Faite par Cédric Turcas</p>© Photo <acronym title="Patrice Morel">P.M.</acronym> / Collectif <acronym title="Jean de Neyman">J.d.N.</acronym>, 20230902-7945 <p>1er rang : Yvon Renévot, Pierre Stapf, Claire Bucbinder, Dominique de Neyman et Yolande Dréano</p>© Photo <acronym title="Patrice Morel">P.M.</acronym> / Collectif <acronym title="Jean de Neyman">J.d.N.</acronym>, 20230902-7948 <p>(merci de nous renseigner sur les personnes représentées)</p>© Photo <acronym title="Patrice Morel">P.M.</acronym> / Collectif <acronym title="Jean de Neyman">J.d.N.</acronym>, 20230902-7967 <p>Cédric Turcas</p>© Photo <acronym title="Patrice Morel">P.M.</acronym> / Collectif <acronym title="Jean de Neyman">J.d.N.</acronym>, 20230902-7925 <p> ?, Véronique Mahé, Françoise Cabon</p>© Photo <acronym title="Patrice Morel">P.M.</acronym> / Collectif <acronym title="Jean de Neyman">J.d.N.</acronym>, 20230902-7953 <p>Joël Busson, ?</p>© Photo <acronym title="Patrice Morel">P.M.</acronym> / Collectif <acronym title="Jean de Neyman">J.d.N.</acronym>, 20230902-7962 © Photo <acronym title="Patrice Morel">P.M.</acronym> / Collectif <acronym title="Jean de Neyman">J.d.N.</acronym>, 20230902-7912 <p>Cédric Turcas, Dominique de Neyman, Claire Bucbinder, Pierre Stapf</p>© Photo <acronym title="Patrice Morel">P.M.</acronym> / Collectif <acronym title="Jean de Neyman">J.d.N.</acronym>, 20230902-7985 <p>Pierre Stapf, Claire Bucbinder, Dominique de Neyman et Olivier Guivarc'h</p>© Photo <acronym title="Patrice Morel">P.M.</acronym> / Collectif <acronym title="Jean de Neyman">J.d.N.</acronym>, 20230902-7914 <p>Jean a beaucoup défendu ce syndicat ; lire Le Prolo de La Bruche !</p>© Photo <acronym title="Patrice Morel">P.M.</acronym> / Collectif <acronym title="Jean de Neyman">J.d.N.</acronym>, 20230902-7921 <p>Encadrés par les porte-drapeaux : Véronique Mahé, Christian Retailleau, Cédric Turcas, Dominique de Neyman, Claire Bucbinder, Pierre Stapf</p>© Photo <acronym title="Patrice Morel">P.M.</acronym> / Collectif <acronym title="Jean de Neyman">J.d.N.</acronym>, 20230902-7980 <p>Christian Retailleau lit le protocole au côté de Cédric Turcas</p>© Photo <acronym title="Patrice Morel">P.M.</acronym> / Collectif <acronym title="Jean de Neyman">J.d.N.</acronym>, 20230902-7916 © Photo <acronym title="Patrice Morel">P.M.</acronym> / Collectif <acronym title="Jean de Neyman">J.d.N.</acronym>, 20230902-7974 <p>Pierre Stapf, Claire Bucbinder, Dominique de Neyman, famille De Neyman toujours fidèle</p>© Photo <acronym title="Patrice Morel">P.M.</acronym> / Collectif <acronym title="Jean de Neyman">J.d.N.</acronym>, 20230902-7970

Note : Le "i" bleu en haut et à gauche qui apparaît sur certaines images vous donne une information sur le document présenté.

Personnes citées dans les photos : Claire BUCHBINDER (Membre du Collectif Jean de Neyman - famille de Neyman), Joël BUSSON (Administrateur au Comité Départemental du Souvenir), Françoise CABON (Membre du P.C.F.), Dominique de NEYMAN (Membre du Collectif Jean de Neyman - famille de Neyman), Yolande DRÉANO (Membre du P.C.F.), Olivier GUIVARC’H (Membre du Collectif Jean de Neyman - documentaliste), Véronique MAHÉ (Membre du P.C.F.), Patrice MOREL (Membre du Collectif Jean de Neyman - photographe), Christian RETAILLEAU (Président du Comité Départemental du Souvenir), Pierre STAPF (Membre du Collectif Jean de Neyman - famille de Neyman), Cédric TURCAS (Secrétaire du P.C.F.).