Au Musée de la Résistance nationale, à Champigny-sur-Marne, nous trouvons, dans le fonds Paul LANGEVIN, entre autres archives, plusieurs feuilles que l’on pourraient décrire comme "tapuscrits-manuscrits". Effectivement, entre les frappes de machine à écrire viennent s’insérer des formules, mathématiques, de physique et de géométrie, manuscrites. Elles ont pour identifiant commun d’émaner de Jean de NEYMAN ; envoyées par son père, après son exécution, à cet illustre physicien pour mettre en exergue son fils prodige.
Nous avons voulu en savoir plus et confiés ces travaux au Docteur Benoît VIAUD, physicien des particules au C.N.R.S. qui nous a sympathiquement répondu :
J’ai jeté un œil "rapide".
Ce document ne rend pas compte de travaux scientifiques à proprement parler. Il s’agit plutôt d’écrits de nature pédagogique, probablement destinés à des élèves de lycée ou de fin de collège (de l’époque).
Donc, si tu veux des commentaires vraiment pertinents, je te conseille vivement de soumettre ces quelques pages à un ou une enseignante en mathématiques ou en physique (N.D.L.R : la bouée est lancée...). Il y a probablement des choses qu’elle ou il appréciera mieux que moi.
Ce que je me risquerais, moi, à en dire, se résume ci-dessous :
1. Dans une première partie, il présente des astuces mathématiques pour réaliser certains calculs plus vite et plus facilement. Par exemple des carrés à effectuer éventuellement de tête. Il s’agit là d’effectuer des calculs exacts.
2. Dans une seconde partie, il présente à nouveau des techniques permettant de calculer plus facilement. Dans ce cas, il s’agit par contre d’effectuer des calculs approximatifs (mais encore très proches des résultats exacts beaucoup plus long à obtenir). Pour justifier cette démarche, il s’appuie sur la notion d’incertitude, centrale en sciences expérimentales (s’il était agrégé de physique, ça lui est sans doute venu de là).
En gros, imagine que l’on te donne B et C, et qu’on te demande de calculer A=B*C.
Si B et C sont des quantités mesurées ou calculées à 1% près, mais qu’on te les donne avec 9 chiffres après la virgule, tu peux te passer des 7 derniers, qui ne veulent rien dire. De même, si la quantité ’A’ ne peut pas être mesurée à mieux que 1%, pourquoi la calculer jusqu’au 12e chiffre après la virgule ?
Il donne ici des techniques pour faire des approximations qui resteront très petites, et très suffisantes.3. Dans une dernière partie, il propose une démonstration de son cru en géométrie. Je n’ai rien à en dire. Il me faudrait un certain temps pour en voir l’astuce ou l’intérêt particulier, et je pense que c’est inutile dans l’optique de la conclusion qui me paraît la plus intéressante.
Ce que je retiens de ce document, c’est avant tout sa volonté d’être bon pédagogue. En enseignant des astuces de calcul, il permet aussi à ses élèves de mieux comprendre l’arithmétique, car ces astuces ont un sens. On les trouve en décomposant les nombres, c’est à dire en comprenant ce que l’on calcule plutôt qu’en appliquant dans la douleur des recettes toutes faites. En leur enseignant des calculs approchés, il leur fait prendre conscience de l’importance des incertitudes, des chiffres significatifs, etc. Or, déterminer et gérer ces incertitudes est un sujet crucial en science. Un physicien effectuant une mesure importante passe parfois plus de temps à cela qu’à tout le reste. C’est aussi une compétence centrale en ingénierie.
Cartel à mettre lors d’une exposition
Document de 12 pages attribué à Jean de Neyman (date inconnue). Il y présente notamment des techniques arithmétiques permettant d’effectuer plus facilement certains calculs, d’abord de façon exacte, puis de manière approchée. Révélant un souci de pédagogie certain, il permet à ses élèves, entre autres choses, de se familiariser dès le lycée avec les notions d’incertitude, centrales en sciences expérimentales.
© Collection A.A.M.R.N. - Fonds Paul LANGEVIN